Modifié le 01/10/2021 à 16:57

Quelles sont les différentes notions qui entourent le concept de bas carbone dans le bâtiment ? Réponses avec Hélène Genin, déléguée générale de l’association BBCA.

Catégorie “BBCA tertiaire neuf” : Saint-Denis (93) – WoodWork. Maître d’ouvrage : WO2 / Architecte : Nicolas Laisné et Dimitri Roussel / Constructeur : Vinci construction / Bureaux d’études : Sinteo. Label BBCA Neuf 2018 délivré par Certivéa – Niveau : performance – Stade : conception.
Projet salué par l’association lors du forum BBCA 2019. Catégorie “BBCA tertiaire neuf” : Saint-Denis (93) – WoodWork. Maître d’ouvrage : WO2 / Architecte : Nicolas Laisné et Dimitri Roussel / Constructeur : Vinci construction / Bureaux d’études : Sinteo. Label BBCA Neuf 2018 délivré par Certivéa – Niveau : performance – Stade : Livraison février 2021. [©Nicolas Laisné]

L’association pour le développement du Bâtiment Bas Carbone (BBCA) a été créée, en 2015, avant la Cop 21. Elle est née autour de maîtres d’ouvrage et maîtres d’œuvre impliqués dans la lutte contre le réchauffement climatique et la question du bas carbone. L’année dernière, l’association a d’ailleurs publié “Construire bas carbone, manuel à l’usage des décideurs”. Quelles sont les différentes notions qui entourent ces thématiques dans le bâtiment ? Réponses avec Hélène Genin, déléguée générale de l’association BBCA.

Comment se situe le bâtiment en termes d’empreinte carbone ?

Hélène Genin : Cela fait six ans que nous travaillons sur la cause écologique, une problématique urgente. Le bâtiment en France représente 27 % des émissions de CO2. Près de 40 % des émissions de carbone sont aux mains des bâtisseurs et 60 % aux habitants. Si nous étions, jusqu’alors dans une démarche de performance énergétique, la RE 2020 ou encore loi Climat, nous font revoir nos paradigmes et établissent un peu plus la notion de bas carbone. Les solutions et les référentiels existent pour agir. Il faut considérer le bâtiment et les matériaux mis en œuvre sur tout leur cycle de vie. Du chantier à la fin de vie, en passant par la phase d’usage.

Les matériaux biosourcés et le bois ont la cote en ce moment. Quels sont leurs avantages “bas carbone” ?

La notion de stockage de carbone est primordiale. C’est ce qui fait que l’utilisation du biosourcé est importante. Par exemple, les arbres captent le carbone et rejettent l’oxygène. Ils fonctionnent en flux constant avec la croissance de l’arbre. A maturité, le carbone reste, mais le flux se tarit. Le bois peut ainsi stocker pendant des siècles jusqu’à 200 kg de CO2/m2 de surface. Le renouvellement des forêts participe à maintenir ce flux vertueux.

Tous les matériaux d’origine végétale sont concernés par ce mécanisme. C’est ce que nous appelons la photosynthèse. Evidemment, selon leurs caractéristiques, les quantités de carbone stockées diffèrent. Le bois massif va avoir une capacité de stockage plus importante qu’un isolant biosourcé.

Mais, cette notion doit aussi prendre en compte la durée de vie du matériau, afin d’en évaluer le gain. Les Fdes sont aujourd’hui une mine d’informations pour connaître ces paramètres sur les matériaux. Tous les types de produits ne sont pas encore renseignés. Il faut faire évoluer ses pratiques, pour faire du bas carbone.

Justement, qu’est-ce qui diffère dans la réalisation d’un bâtiment bas carbone ?

Dans un projet, la notion de bas carbone doit être prise en compte très en amont. Tous les acteurs de la chaîne vont être impliqués et collaborer ensemble. Les architectes ont de plus en plus une démarche bioclimatique et sobre. Ils vont davantage inclure les questions de la réversibilité ou du bon matériau au bon endroit. Nous entrons dans une logique où les projets sont jugés à l’aune de l’empreinte carbone. Si cette dimension est prise en compte trop tard dans la conception, cela peut devenir plus coûteux qu’un projet classique. Le label BBCA permet d’accompagner les professionnels dans cette démarche. En phase conception, il peut être délivré de façon provisoire. Cela permet de poser une ambition carbone et de garder le bon cap. Il est réévalué ensuite au stade réalisation et achèvement.

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En termes de coût, cela va varier. Il est vrai que dans un projet bas carbone, il y a plus d’ingénierie et plus de partenaires. Les matériaux peuvent être plus chers aussi, même si cela se corrige avec la montée en puissance du biosourcé et de son industrialisation. Ces coûts sont compensés par le gain de temps sur le chantier. En effet, le calendrier est plus court sur les réalisations “bas carbone”. Nous arrivons finalement à construire au même prix.

La RE 2020 est déterminante pour massifier et généraliser cette ambition. Un apprentissage est nécessaire pour accompagner vers cette transition.

Si la RE 2020 va booster la construction bas carbone, qu’en est-il de la rénovation ?

La grande question reste la rénovation bas carbone. C’est une notion qui n’est pas du tout traitée par l’Etat dans les différentes mesures mises en place. Nous attendons une évolution de la réglementation. En 2018, l’Association BBCA a lancé un label rénovation bas carbone. Il comprend trois niveaux : standard performance et excellence, avec différents degrés d’émissions plus ou moins élevés que des bâtiments neufs.

Dans cette logique, il vaut mieux rénover que détruire. Et conserver les matériaux qui ont déjà émis ou en rajouter d’autres à impact carbone réduit. La rénovation ne doit pas se limiter à la rénovation énergétique. Il existe beaucoup de leviers pour baisser l’empreinte carbone : l’exploitation responsable, la notion d’économie circulaire et de l’éco-construction sont aussi à prendre en compte. Il est indispensable d’optimiser la consommation de matériaux et la partie usage du bâtiment.