Economie : Quand la reprise se heurte à la crise des matières premières

Rédaction
27/09/2021
Modifié le 29/11/2021 à 17:57

Depuis fin 2020, le bâtiment, comme d’autres secteurs d’activité, font face à un phénomène de hausses des prix, voire de pénuries de matières premières. Quelles sont les causes ? Comment les acteurs du secteur appréhendent le problème ? Réponses…

Article paru dans le n° 96 de Béton[s] le Magazine

 La hausse des prix des matières premières est le résultat d’une conjoncture d’évènements.[©ACPresse]
La hausse des prix des matières premières est le résultat d’une conjoncture d’évènements.[©ACPresse]

Après un grand coup d’arrêt en mars 2020, l’activité de la construction a vite su reprendre du poil de la bête. En parallèle, depuis presque un an, le secteur subit de fortes pressions de hausses des prix, voire des pénuries de matières premières, mettant ainsi en péril la reprise. « C’est arrivé progressivement, fin 2020 – début 2021, détaille Franck Bernigaud, président de la Fédération des distributeurs de matériaux de construction (FDMC). Au début, le phénomène s’est manifesté au niveau de l’acier de construction. C’est un marché assez spéculatif, donc nous n’étions pas très inquiets. »

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Mais voilà, au fur et à mesure, le mal a atteint plusieurs types de matériaux. Les prix du bois de construction se mettent à flamber et la matière devient une denrée rare. Dans diverses proportions, le plâtre, le polystyrène et autres résines suivent la même trajectoire. « Toutes les entreprises sont touchées, que ce soit des PME ou des grands groupes, expliquait Pascal Hoareau, président du Sipev1 au début de cette crise économique. Pour la première fois, nous sommes obligés de refuser des commandes. » 

Dans ce contexte, la FFB estime que 30 % des chantiers pourraient stopper si le phénomène s’installe trop dans le temps. A ce jour, la fédération a déjà constaté que 15 % des entrepreneurs déclarent avoir dû arrêter ou retarder leurs chantiers faute d’approvisionnement contre 3 à 4 % en temps normal. Selon la Capeb, 76 % des entreprises artisanales du BTP déclarent une hausse des prix des matériaux et 57 % se plaignent d’une rupture d’approvisionnement. « Une conjoncture d’évènement a mené à cette flambée des prix, reprend Franck Bernigaud. Durant le premier confinement, il y a eu un ralentissement de la production. Or, en novembre/décembre 2020, des mois qui enregistrent traditionnellement une baisse d’activité, le secteur a repris très fort. Cela est venu perturber l’ordonnancement habituel. Une chose qui n’a pas été anticipée. »

Toutes les filières sont touchées

A cela s’ajoute, l’activité exponentielle de la Chine, mais aussi des Etats-Unis. « La Chine a repris très fortement, et compte entre six mois et un an d’avance », témoigne Amaury Omnès, président de l’Afipeb2. Et Frédéric Boisse, secrétaire général du SNMI3de compléter : « Ce pays est en pleine expansion et investit dans ses structures et infrastructures. Il absorbe naturellement les matières premières. La France ne détient pas des tonnes de matières de base et transformées ou des métaux rares… » A cela s’ajoutent, une hausse des prix de logistique et de fret maritime, des incidents météorologiques aux Etats-Unis et un incendie dans une grosse industrie allemande…

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Si par son aspect plus local, le béton semble résister à la tempête, le secteur est malgré tout impacté. « C’est la loi de l’offre et de la demande, observe Franck Bernigaud. Par capillarité, toutes les filières sont touchées. » Dans le dernier numéro de Béton[s] le Magazine, plusieurs acteurs du coffrage avaient fait état de leurs inquiétudes face à ce phénomène. De son côté, le Seimat4estime un allongement des délais de livraison de 10, voire de 20 semaines supplémentaires pour de nombreuses catégories de matériels. « C’est une crise totalement inédite. Si nous nous attendons à une situation plus calme en fin d’année, nous avons une vision incertaine sur 2022… »Interrogé sur la question, Bruno le Maire, ministre de l’Economie, explique que « la seule réponse sur le long terme à la pénurie de matières premières, c’est notre indépendance sur certaines matières ! »

Sivagami Casimir

1Syndicat national des industries de peinture, enduit et vernis.
2Association française de l’isolation en polystyrène expansé dans le bâtiment.
3Syndicat national des mortiers industriels.
4Syndicat des entreprises Internationales de matériels de travaux publics, mines et carrières, bâtiment et levage, manutention.

Article paru dans le n° 96 de Béton[s] le Magazine