Dossier : Bétons et éco-construction #1

Rédaction
30/03/2022
Modifié le 31/05/2022 à 15:24

La transition écologique rapportée à tous les domaines demande une vision globale. Le monde du béton ne déroge pas à la règle et s’active sur tous les fronts.

Article paru dans le n° 99 de Béton[s] le Magazine

Tour de production de l’unité H2, en cours de construction à l’aide du ciment H-UKR, sur le site Hoffmann Green Cement de Bournezeau, en Vendée.  [©HGCT]
Tour de production de l’unité H2, en cours de construction à l’aide du ciment H-UKR, sur le site Hoffmann Green Cement de Bournezeau, en Vendée. [©HGCT]

Mini Sommaire :

N’en déplaise aux climato-septiques, les dégâts du réchauffement climatique sont déjà visibles. Dans son dernier rapport diffusé le 28 février dernier, le Giec1 estime qu’il y aurait déjà entre 3,3 et 3,6 Md d’humains impactés par ce dérèglement. Près de la moitié de la population mondiale… Si les différentes COP et politiques d’Etats s’activent sur le sujet, l’objectif est surtout de sauver les meubles (et, par la même occasion, les humains, la faune et la flore…). Et ainsi, de rester en dessous des + 4 °C en 2100.

Parmi les secteurs les plus émetteurs, la construction (bâtiment et industrie) figure parmi les mauvais élèves. Dans la quête de la neutralité carbone et de la ville frugale, l’éco-construction prend donc tout son sens. Dans ce contexte, comment l’industrie du béton s’adapte-t-elle ? Quelles sont les nouvelles technologies ? Les nouvelles pratiques sur le chantier ? Et les acteurs moteurs ? Dans ce dossier, traité en deux parties, nous avons essayé de cartographier des éléments de réponses, en interrogeant un secteur engagé dans une mutation plus que nécessaire.

Vers des technologies d’avenir

Depuis quelques années, un bon nombre de Français consomment davantage, voire même de manière exclusive, des produits issus de l’agriculture biologique. Un mode de vie qui répond à des revendications environnementales et sanitaires. Cependant, dans les enseignes spécialisées, nous pouvons trouver des produits estampillés avec la fameuse certification “bio”, mais cultivés à plus de 7 000 km du consommateur. Ou encore des fruits ou légumes “bio” d’été vendus en plein hiver… D’un point de vue environnemental, on peut se poser la question, de manière légitime, de la pertinence de cette situation. L’appellation “bio” efface-t-elle les émissions de gaz à effet de serre des kilomètres parcourus ?

En décembre dernier, l’Ademe a diffusé quatre scenarii pour atteindre la neutralité carbone. Si chacun aborde le sujet de façon plus ou moins ambitieuse, ces trajectoires démontrent bien l’interconnexion des problématiques et des activités : l’agro-alimentaire, la mobilité, l’industrie ou encore le bâtiment… La transition écologique rapportée à tous les domaines demande une vision globale. Dans le bâtiment, est-ce qu’il serait vraiment réaliste de dire que seule, la suppression du béton dans l’acte de construire résoudrait la transition écologique du secteur ?

Une vision globale de la transition écologique

Eqiom a fourni les bétons du chantier de l’îlot Fertile, à Paris. L’utilisation de CEM III/A 42,5 N (en lieu et place d'un CEM II/A 42,5) a permis d'économiser 40 % de CO2, soit près de 1 300 t. [©Eqiom]
Eqiom a fourni les bétons du chantier de l’îlot Fertile, à Paris. L’utilisation de CEM III/A 42,5 N (en lieu et place d’un CEM II/A 42,5) a permis d’économiser 40 % de CO2, soit près de 1 300 t. [©Eqiom]

En discutant avec les professionnels du domaine, il devient assez évident que de nombreux paramètres entrent en jeu. La façon de concevoir, l’interprétation de la ville et la place des citoyens ont leur importance. Il ne faut pas oublier que l’acceptabilité de la transition par la société doit être prise en compte. Les changements de paradigme opérés par la réglementation, mais aussi par les maîtres d’ouvrage, les constructeurs et les industriels poussent à repenser le bâtiment. De plus, la notion de circularité de l’économie commence à se greffer à la réflexion collective. Où et comment est extraite et exploitée la matière première ?

Quel type de process de production est utilisé ? Quel moyen constructif est mis en œuvre ? Pour quelle performance et pour combien de temps ? Quel est le taux de recyclabilité ou de réutilisation d’un produit ? L’ensemble de ces questions est cruciale dans l’éco-construction. Mettant ainsi en place une logique plus responsable et économe en émissions de CO2. Car il est bon de rappeler que le carbone a tout de même une durée de vie bien supérieure aux 100 ans réglementaires dans l’atmosphère. Et que les conséquences du réchauffement climatique sont déjà visibles et vouées à s’intensifier.

Au-delà de l’addition d’indicateurs carbone.

Mais tout ne devrait pas se résumer à une simple addition d’indicateurs carbone. D’autant plus qu’ils peuvent être différents d’un fabricant de matériaux à un autre, selon le calcul, la temporalité, l’interprétation, comme nous avons pu le constater, par exemple, pour les laitiers de hauts fourneaux [Lire BLM 96 p.34]. On peut même trouver des matériaux émetteurs dotés d’un impact carbone négatif après une compensation d’impact environnemental. A l’image de certaines enseignes BtoC vous proposant de planter un arbre pour contrebalancer l’achat d’un T-shirt venu d’Asie.

Lire aussi : Enquête : Entreprises et industriels face à leurs ambitions environnementales

D’autres notions d’économie circulaire, mais aussi de durabilité, de confort, de réglementation feu, d’acoustique ou encore de thermique, ne sauraient être lésées. L’heure devrait être à la recherche de sens. Dans cette quête, l’innovation constitue un levier majeur. Chacun explore, teste, met en œuvre dans la limite imposée par la réglementation, ou en prévision de l’évolution des normes, de nouvelles techniques et solutions. Le monde du béton n’est pas en reste. Et ce, à toutes les étapes de sa vie.

Dossier réalisé par Sivagami Casimir

1Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat.

Retrouver la partie #2 du dossier ici.

Article paru dans le n° 99 de Béton[s] le Magazine