Bâti et Isolation donne la parole à deux experts Creston, Lucien Crevel et Olivier Rieffel, dans une tribune ouverte sur le l’idée d’efficacité énergétique comme défi surmontable et comme source de croissance. Sous certaines conditions.
Bâti et Isolation donne la parole à deux experts Creston, Lucien Crevel et Olivier Rieffel, dans une tribune ouverte sur le l’idée d’efficacité énergétique comme défi surmontable et comme source de croissance. Sous certaines conditions.
En décembre 2011, la table ronde nationale instituée dans le cadre du Grenelle de l’Environnement et sous l’égide du Ministère de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, a émis un programme d’actions pour l’efficacité énergétique qui acte un large éventail d’annonces, de recommandations et d’intentions. Ce programme positionne les technologies numériques au centre des solutions et dispositifs incontournables pour créer des espaces garantissant un meilleur contrôle énergétique et une amélioration des conditions de vie et de travail au cœur des bâtiments. Il représente une extraordinaire opportunité de croissance pour tous les acteurs du secteur dont les activités tendent à permettre une réduction sensible, coordonnée et maîtrisée des charges d’exploitation des bâtiments. Cela demande néanmoins des changements de comportement non seulement des donneurs d’ordre et des utilisateurs, mais également des partenaires en charge de la maîtrise d’œuvre, dont nous faisons partie.
Voici quelques points qui méritent selon nous d’être mis en avant :
Il n’est guère raisonnable de gérer l’exploitation d’un bâtiment sans disposer d’une vue d’ensemble et d’un tableau de contrôle complet des différents services et postes énergétiques. Concrètement, il est possible aujourd’hui, via des développeurs et des intégrateurs spécialisés, d’installer des « cerveaux » capables, avec l’appui de logiciels simples de visualisation, d’afficher en temps réel les niveaux de consommation des différents fluides, par site, durée, et ainsi d’obtenir des statistiques et d’établir des projections qui serviront à évaluer au plus près les besoins futurs. Aujourd’hui, la plupart des fluides sont gérés séparément. Les corps de métiers en charge de chacun d’eux se concentrent sur leur spécialité propre, parfois dialoguent, mais n’ont pas, et c’est compréhensible, une approche 100% commune.
Réussir cette vue d’ensemble est possible par l’amélioration des échanges non seulement des professionnels mais aussi des technologies intégrées entre elles. C’est cette connexion, à la manière des synapses d’un cerveau contrôlant différentes fonctions du corps, qui est au cœur de notre métier et qui nous fait parler de « bâtiment intelligent ». Dans la chaîne de décisions pour la construction ou la rénovation d’un site, il faut qu’une fonction de domoticien apparaisse ou se renforce sensiblement, avec pour mission de rassembler et de contrôler sur une même plate-forme les installations jusqu’à présent autonomes. Le domoticien doit agir comme un maître d’orchestre, connaître les particularités de chaque métier, les explorer et les exploiter par l’échange constructif. Il se poste non comme un complément mais comme un pivot. Il a pour fonction de fédérer les bureaux d’étude, est garant de la bonne marche du projet, voire donneur d’ordre pour le client final si celui-ci le mandate. La finalité de son rôle consiste toujours à chercher les meilleures solutions qui répondent aux choix de l’utilisateur, qu’il aura préalablement éclairés si besoin. Autrement dit, le bâtiment n’est intelligent que s’il répond vraiment aux problèmes des usagers, améliore leur confort et dégage des économies sur des termes prédéfinis.
Parmi les objectifs du programme sur l’efficacité énergétique, on distingue la recherche conjointe d’une maîtrise de l’impact environnemental des activités et des gains de productivité. Ensemble, ces deux aspects tendent à améliorer la compétitivité des entreprises et institutions, qu’elles soient privées ou publiques. Cet aspect est primordial pour emporter l’adhésion des différents décisionnaires, lesquels appréciant diversement les dispositifs que les pouvoirs publics mettent en place pour répondre aux règles nouvelles du Grenelle de l’environnement. Ce n’est qu’en conservant une approche pragmatique et concrète des gains et avantages induits par une meilleure gestion de l’énergie que les chances de réussite, c’est-à-dire le maintien ou l’augmentation des résultats économiques et environnementaux de l’activité, seront les plus grandes.
Concilier exigences environnementales, par exemple en visant des labels HQE, conditions améliorées de travail et de vie et productivité est aujourd’hui un défi avant de devenir, demain, la règle. L’obligation faite désormais aux immeubles de bureau de cesser le gaspillage d’électricité en laissant des espaces éclairés inutilement est une première étape qui doit encourager à avancer plus rapidement dans la domotique des bâtiments. Au-delà de la simple chasse aux gaspillages, il s’agit bien d’adopter une approche citoyenne plus éco-responsable dont nous ne pouvons que tirer des bénéfices importants en termes d’économies, de responsabilité et d’exemplarité. La prochaine étape, techniquement déjà au point, consistera à rendre un bâtiment non seulement intelligent, mais capable de gérer la conditionnalité , c’est-à-dire de s’adapter automatiquement en fonction des conditions climatiques en cours et à venir, prévenir les montées ou les baisses de température, les risques de vents ou les variations de lumière solaire. Chaque chose en son temps bien sûr et la bonne nouvelle, pour conclure, c’est que sur ces questions la France est à la pointe et mérite de le rester.