Cem’In’Eu : Conteneur + train, le clinker voyage propre

Rédaction
01/12/2020
Modifié le 02/12/2020 à 11:20

Toujours à la recherche de solutions épargnant l’environnement, Cem’In’Eu a choisi le conteneur et la voie ferrée pour l’alimentation en clinker de son usine de Tonneins, dans le Lot-et-Garonne. En attendant une alternative fluviale.

Les vraquiers de 20 000 t à 25 000 t acheminent le clinker d’origine turque à Sète toutes 4 à 5 semaines. [©DR]
Les vraquiers de 20 000 t à 25 000 t acheminent le clinker d’origine turque à Sète toutes 4 à 5 semaines. [©DR]

Pour alimenter son usine de Tonneins (47), la start-up cimentière Cem’In’Eu a opté pour la combinaison “conteneur + train”. Ce moyen de transport participe d’une chaîne logistique, qui met en œuvre plusieurs innovations “maison”. Celles-ci lui permettent de limiter ses émissions de CO₂, tout en supprimant toute production de poussière. « Nous évitons ainsi d’émettre 6 000 t/an de CO₂»,se félicite Franck Dupont, co-fondateur de Cem’In’Eu. C’est le résultat du choix d’un transport “massif” de clinker depuis son hall de stockage de Sète (34) jusqu’à l’usine de Tonneins par voie ferrée. « Notre chaîne d’approvisionnement fait appel à une succession de tâches auxquelles nous nous sommes efforcés d’apporter des innovations propres à protéger l’environnement. Comme nous le faisons au travers de notre démarche de production de ciment. Avec des quantités limitées au plus près du client. »

Trémie anti-poussière

La trémie qui recueille le clinker déversé par une benne de 22 t a été conçue par Cem’In’Eu. De puissants ventilateurs en partie haute et une goulotte télescopique éliminent les projections de poussière. [©DR]
La trémie qui recueille le clinker déversé par une benne de 22 t a été conçue par Cem’In’Eu. De puissants ventilateurs en partie haute et une goulotte télescopique éliminent les projections de poussière. [©DR]

Acheté au Turc Medcem, le clinker est acheminé jusqu’au port de Sète par vraquiers de 20 000 à 25 000 t. Une fois toutes les quatre ou cinq semaines. Le matériau est déchargé des cales au rythme de 500 t/h à la benne portuaire de 22 t. Celle-ci déverse le clinker dans une trémie imaginée par Cem’In’Eu et réalisée par RBL-REI. Le spécialiste de la conception et de la construction d’équipements de manutention. « Nous avons demandé à l’entreprise portuaire SPS, chargée de l’opération de déchargement et le transport jusqu’au stock, que le vrac ne soit pas polluant ».

De puissants ventilateurs positionnés en haut du cône éliminent toute émission de poussière lors de son chargement. Tout comme la goulotte télescopique, dont l’extrémité monte à mesure que le clinker est déversé dans la benne des semi-remorques. Le bateau doit être vidé en 4 à 5 j. Ceci, au moyen de 3 à 4 camions qui “brouettent” leur chargement dans le hall de stockage du cimentier, d’une capacité de 30 000 t. 

Conteneurs spéciaux

Deux chargeuses gèrent les stocks successifs selon le principe “Fifo” (“First on First out” : “Premier arrivé, premier parti”). « C’est capital pour la traçabilité du clinker et donc celle de nos produits finis ». Le clinker est ensuite “conteneurisé” – on dit “empoté” en langage portuaire ! Le choix de cette technique est capital pour l’économie du transport. Les conteneurs, de 20’ (environ 6 m), ont été conçus spécialement pour Cem’In’Eu par Combipass.

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Le stock de clinker est géré pour que les approvisionnements successifs soient bien distincts, afin d’en assurer la traçabilité. La capacité de cette installation, 30 000 t, sera portée à 55 000 t l’année prochaine. Elle pourra ainsi alimenter l’usine de Porte-Lès-Valence. [©DR]

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C’est un tracteur portuaire Mafi Terberg qui apporte les conteneurs remplis de clinker vers le chargement des trains. [©DR]

Leur fond et leurs côtés ont été blindés. Leur toit doté de deux “trous d’homme” pour assurer un chargement optimal des 32 t de clinker qu’ils peuvent admettre, avec sa densité de 1,6. Ils sont sortis du hall  a l’aide d’une remorque Mafi tirée par un tracteur Terberg. Et ensuite positionnés le long de la voie ferrée. Ils sont ensuite chargés par un stacker, 2 par 2 sur l’un des 26 wagons d’un train de 350 m. « Cette configuration, la plus vertueuse sur le plan des émissions de poussièreest la plus efficiente en matière de charge utile par wagon », explique Franck Dupont.

Déchargement par basculement

Les conteneurs sont chargés sur le train à l’aide d’un stacker portuaire, à raison de 2 par wagon. [©DR]
Les conteneurs sont chargés sur le train à l’aide d’un stacker portuaire, à raison de 2 par wagon. [©DR]

Affrété par VTG et opéré par RegioRail, le train transporte alors les 1 650 t de clinker, sur 400 km sur la ligne Sète-Bordeaux. A direction de l’usine de Tonneins, 3 fois par semaine. « La longueur de la rame est conditionnée par l’emprise nécessaire, au départ comme à l’arrivée. Les emprises les plus importantes sont monopolisées par les céréaliers et les carriers ! »

A l’usine de Tonneins, les conteneurs sont repris par un pont roulant. Ils sont vidés par basculement, via les portes “minières”, dont ils sont dotés. Et cela dans un réceptacle muni des gros ventilateurs d’une puissance de 42 000 m3/h. Une installation conçue par Cem’In’Eu. Le clinker achève ainsi son périple “de vrac à vrac”. L’installation de Sète, dont la capacité sera portée à 55 000 t l’année prochaine, est prévue pour alimenter aussi l’usine de Portes-Lès-Valence (26), opérationnelle à la fin 2020. 

Voie fluviale attendue

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Les 26 wagons apportent les 1 650 t de clinker à l’usine de Tonneins de Cem’In’Eu. [©ACPresse]

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Autre réalisation “maison”, le système de basculement des conteneurs de Tonneins. Il bénéficie aussi d’un dispositif anti-poussière. [©ACPresse]

Cem’In’Eu projette de doubler ce système avec la voie fluviale pour les deux installations. Tout en respectant le principe de la conteneurisation du clinker. Ce sera réaliste avec un agrandissement du gabarit de Sète au Rhône. « Le bilan carbone de ce type de transport est très favorableMais il faut le lisser avec ses aléas »,constate Franck Dupont. L’un de ses avantages tient à sa lenteur. Et de poursuivre : « Il pourrait nous servir de “stock-tampon”, positif pour lisser les mouvements de la demande dans une stratégie de production à flux tendu ».

« Le modèle sétois est réplicable, comme le sont nos installations de production de ciment, en Atlantique, en mer du Nord », conclut Franck Dupont. Il mettrait donc en œuvre des stockages du type de celui de Sète. Cela pour un investissement de 5 à 6 M€, dont 800 000 € pour la seule trémie.

Michel Roche